[Extrait de notre courrier du 3 mai 2020 adressé au groupe de travail Mairie et Ecoles sur la réouverture des écoles le 11 mai]
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Nous sommes aujourd’hui tous sommés de répondre à l’injonction gouvernementale consistant à mettre en place un protocole sanitaire très strict à l’école dans un délai de quelques jours. Cette perspective du « tout le monde court après le 11 mai » met tous les acteurs dans une situation inconfortable. Du point de vue de la FCPE, les décisions doivent être prises plus posément, dans un objectif de construire collectivement et en proximité avec les parents.
Concernant le sondage actuellement en cours auprès des parents sur leur intention de remettre l’enfant à l’école, comment répondre à cette question sans même connaître les modalités sanitaires et organisationnelles de ce retour à école ?
- Certes, une partie a forgé à cette heure sa conviction profonde sans avoir besoin de plus d’informations, mais qu’en est-il des autres parents ?
- Celles et ceux ayant à ce jour répondu « non » pour des raisons de prudence sanitaire, seront peut-être amenés à dire le contraire prochainement, pour la seule raison d’obligation professionnelle. Cet aller-retour dans la réponse est précisément rendu possible par l’ouverture de l’école, et conséquemment la diminution des droits à absence parentale.
- Pour celles et ceux ayant répondu « oui », la réponse peut évoluer en fonction de l’évolution du contexte sanitaire dans les prochaines semaines.
Tous les cas de figure doivent donc être étudiés plus patiemment, et les réponses au sondage pris avec beaucoup de précaution.
Dans l’attente, nous souhaitons que soit clarifié le fait que les réponses à ce sondage n’ont aucune valeur d’engagement parental. Chaque enfant doit, conformément à la proposition d’organisation, se voir attribuer un groupe dans sa classe, et chaque parent informé de cette affectation.
Concernant le protocole sanitaire en lui même, nous estimons que son réalisme doit être évalué au contour de l’ensemble des enfants inclus dans le sondage, quelle que soit la réponse initiale des parents au sondage.
C’est ainsi que nous émettons de très sérieuses réserves sur le fait que les enfants, remis en collectivité, garderont les distances de sécurité, quel que soit leur niveau. Tous les témoignages reçus jusqu’à présent rapportent que c’est impossible.
- En maternelle, nous imaginons la position difficile des enseignants qui vont devoir « déconstruire » ce qui est enseigné aux enfants : le vivre ensemble. Nous pensons à l’épuisement physique et moral des enseignants qui voudront appliquer strictement le protocole, et à ceux qui « relâcheront » parce que cela sera trop dur de laisser un enfant pleurer sans le réconforter, générant bien malgré eux un risque. La réouverture immédiate de la maternelle est selon nous impensable à ce stade. Les pays autour de nous l’ont compris et ne ré-ouvriront d’ailleurs pas avant septembre.
- En élémentaire, les témoignages sont aussi nombreux : les gestes barrière ne peuvent pas être garantis, même pour des « grands » de CM2. Idem pour les activités Alae. Et c’est bien normal.
Nous souhaitons aussi revenir sur la question de la continuité pédagogique à offrir aux enfants qui ne reviendraient pas à l’école en cette fin d’année. Certes, ce sujet relève exclusivement de l’Éducation Nationale, mais comment la discussion est-elle actuellement traitée avec l’équipe enseignante, déjà sollicitée par le travail conséquent autour du retour en présentiel ? La situation concernerait un nombre significatif d’enfants dés le 11 mai. Il nous parait compliqué de demander aux enseignants concernés de gérer correctement, simultanément et dans l’urgence l’application au quotidien du protocole sanitaire et le suivi des élèves à distance.
Concernant la situation des enfants en grandes difficultés pendant le confinement et autres situations sociales difficiles dans certaines familles, nous estimons que ce devrait être la seule priorité (aux côtés des enfants « prioritaires »), si remise en service de l’école il doit y avoir. Ces enfants sont selon le cas soit connus par les équipes éducatives, soit suivis par les services sociaux municipaux ou départementaux. D’autres ont déjà signifié leur problématique personnelle. Sans disposer des chiffres précis, nous estimons qu’un tel fonctionnement, « réduit à l’indispensable », limiterait de fait la quantité d’enfants présents (et le personnel nécessaire), éviterait de mettre la grande majorité des parents devant un choix cornélien, et permettrait une prise en compte sociale de la situation des familles. Cela laisserait du temps pour espérer garantir mieux l’aspect sanitaire, contrairement à une réouverture, certes en paliers, mais à grande échelle et dans un délai contraint.
Concernant la communication aux parents, il ne vous aura pas échappé qu’il devient urgent de les tenir au courant. Beaucoup se retournent vers nous à ce jour : la FCPE reste prudente dans ses réponses. La situation est suffisamment compliquée pour ne pas rajouter de confusion par des réponses évasives ou partielles. Au delà de l’information, la réouverture de l’école associée à un protocole sanitaire très strict, va nécessiter une implication particulière des parents auprès de leur(s) enfant(s) : cela va générer interrogations, aller retours entre le service scolaire, l’école, les associations de parents d’élèves et bien entendu les parents eux-mêmes. Encore une fois, on voit les limites d’un calendrier trop contraint.
En conclusion, nous souhaitons donc que soit reconsidéré, à Escalquens en particulier, ce délai imposé au 11 mai, générateur de tensions et de craintes légitimes. L’enjeu sanitaire est de taille, et ne doit souffrir d’aucune précipitation que nous pourrions tous regretter a posteriori.
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